Psycho-Somatoanalyse
Créée par Richard Meyer, médecin psychiatre, la somatothérapie réintègre le corps (soma) dans la thérapie.
Le corps devient alors le messager de l'histoire de la personne concernée et celle-ci peut, à l’aide de son corps, se libérer de ses blocages en exprimant ses ressentis et en trouvant ses solutions.
La respiration, la relaxation, les états modifiés de conscience, ou encore la voix ou le toucher harmonisant, sont autant de techniques utilisées dans le cadre de cette pratique. Toutes contribuent à un processus thérapeutique dans la globalité de l'être.
La somatothérapie désigne l'ensemble des techniques psycho-corporelles, qui tiennent compte de la mémoire corporelle. En effet, tout notre vécu, présent et passé, se trouve écrit dans l'histoire de notre corps.
FREUD, FERENCZI, REICH, LOWEN, WINNICOTT, LACAN, DOLTO et MEYER sont les principaux auteurs de référence des psychosomatoanalystes.
Richard Meyer, Les thérapies psycho-corporelles, quand le corps parle.
Les thérapies psycho-corporelles se multiplient. Comment s’y retrouver dans ce foisonnement ? Décryptage avec le psychiatre Richard Meyer.
Article tiré du magazine Inexploré n°19 juillet septembre 2013 :
Le Dr Richard Meyer est à l’origine et à la tête de l’Ecole européenne de psychothérapie socio-et somato-analytique. Psychiatre, ancien interne du CHU de Strasbourg, ancien médecin assistant de l’université de Lausanne, il possède un doctorat en sociologie et ethnologie. Il est l’auteur de plusieurs livres.
Qu’est-ce qu’une thérapie psycho-corporelle ?
Une thérapie psycho6corporelle, c’est d’abord une thérapie, et même une psychothérapie, à laquelle on ajoute un travail corporel, autrement dit une psychothérapie intégrant le corps.
Personnellement j’ai proposé un terme universel pour nommer cette famille psychothérapeutique : la somato-thérapie, de soma qui signifie le corps en grec ancien. Dans la psychothérapie classique, vous n’avez qu’un outil, qui est la parole. Alors qu’au niveau du corps, vous avez deux douzaines de fonctions et les cinq sens, incluant le toucher, le mouvement, la voix, la respiration, les états de conscience modifiés, etc. On peut travailler avec toutes ces fonctions, ce qui permet une approche globale.
Chacune de ces fonctions a-t-elle donné naissance à une technique particulière ?
En quelque sorte. Le toucher a donné les massages – il existe des centaines de massages différents. Le mouvement a donné l’expression corporelle, la danse-thérapie...
Il faut savoir qu’il y a des centaines de pratiques psychocorporelles. On peut les classer soit d’après la ou les fonctions qu’elles font intervenir, soit selon leur durée. La plupart sont des thérapies courtes, de 10-15 séances jusqu’à des durées moyennes de 1 ou 2 ans. Aujourd’hui, les thérapies psycho-corporelles représentent la moitié des thérapies qui sont pratiquées en France.
Dans une séance de thérapie psycho-corporelle, on peut donc être amené à travailler avec le mouvement, à faire des exercices de respiration, à être touché physiquement ?
Tout à fait. On peut bouger, respirer, explorer le contact. La différence par exemple entre un massage bien-être et psychothérapeutique, c’est que dans le premier cas, si la personne vit quelque chose de personnel, le masseur classique, n’entrera pas dans ce qui se passe. Dans le second cas, le thérapeute l’accueillera. Ce qui se présente pourra faire l’objet d’un travail psychologique.
Pourquoi intégrer le corps dans une psychothérapie ?
Pourquoi est-ce qu’on n’intégrerait pas le corps dans la psychothérapie ? Voilà la question. Et pourquoi l’avoir exclu ? Il y a 150 ans, la médecine est devenue purement organique et la psychologie désincarnée. Heureusement, durant le XXe siècle, 2 grands courants ont réintégré le corps à la psychologie : le courant de la psychanalyse, avec les disciples de Freud tels que Sandor Ferenczi et Wilhelm Reich, et leurs élèves respectifs. Ce courant a produit de nombreuses méthodes comme la végétothérapie, la bioénergie...
Un deuxième courant, qui n’est pas du tout analytique, est constitué de praticiens du corps. Il s’agit de sportifs, de danseurs ou de gens qui ont eu des pathologies personnelles et qui à partir de leurs soins auto-thérapeutiques, ont créé une méthode. C’est le cas de Gerda Alexander qui a mis au point l’eutonie il y a 100 ans, parce qu’elle était atteinte d’un rhumatisme articulaire et qu’elle s’est rééduquée elle-même, ou encore de Moshe Feldenkrais.
Où en sommes-nous aujourd’hui dans cette évolution ?
Cette évolution de la réintégration du corps à la psychothérapie comporte 4 étapes.
D’abord, c’est le corps fonctionnel qui a été récupéré : la détente, le mouvement, la relaxation.
Ensuite, dans l’entre-deux-guerres et après guerre, on s’est intéressé au corps émotionnel : la respiration, l’expression émotionnelle, le cri.
La troisième étape s’est faite à partir du corps sensuel jusqu’au corps sexuel, avec mai 68 : le toucher, le massage, la sexologie. On s’est alors demandé où on allait arriver.
Curieusement, c’est le corps spirituel qui a suivi : les états de conscience modifiés, la méditation. L’importation de pratiques orientales a contribué à l’évolution de toutes ces thérapies psychocorporelles. La grande mode actuellement, c’est la méditation et le travail sur les états de conscience modifiés, qui utilisent beaucoup la respiration. à tout cela, on pourrait rajouter une cinquième étape qui serait l’intégration de toutes les techniques qui ont été élaborées.
En quoi le corps nous aide-t-il à accéder aux états modifiés de conscience ?
Le cerveau est un organe corporel. Il fait partie du corps. Et il sécrète des pensées, des images, des sensations, des souvenirs, des fantasmes, et entre dans des états différenciés de conscience. Ce cerveau est en relation constante avec le fonctionnement général de l’organisme. Donc l’état corporel général influence le cerveau. Cela fait du corps une porte d’entrée vers la modification de l’état du cerveau et vers la production d’états modifiés de conscience.
La respiration, le rebirth, la respiration holotropique, la pneumo- analyse, sont des techniques psycho-corporelles très efficaces pour produire des états de conscience modifiés. Il y a également beaucoup de méditations par la respiration. Vous ne pouvez pas obliger votre conscience à se relâcher. Si vous lui commandez de se relâcher, vous la concentrez et vous la stressez. Il n’y a que des techniques globales, qui incluent des aspects corporels, qui permettent à l’organe cerveau, ce viscère là -haut, de se détendre et d’entrer dans des états de conscience modifiés.
Agit-on également sur l’énergie ?
Oui, l’énergie est là dans notre corps bien que nous ne la sentions pas toujours. Et si les scientifiques ne savent pas encore réellement ce que c’est, cela ne nous empêche pas de travailler avec, de faire avec les corps des expériences qui sont reproductibles, et qu’on peut enseigner aux étudiants.
Le but de toutes les somatothérapies, c’est l’éveil énergétique dans le corps. Toutes cherchent à éveiller les centres énergétiques, à libérer l’énergie et à la faire circuler. Là encore, il y a des centaines de méthodes qui visent à éveiller et à stabiliser cette énergie. Car il ne suffit pas d’une expérience énergétique ponctuelle, il faut la sentir sur la durée. Et cette énergie peut même se transmettre, c’est ce que font les guérisseurs.
Pouvez-vous nous donner un exemple concret, tiré de votre pratique, de l’efficacité des thérapies psychocorporelles ?
Je prendrai l’exemple de Romi, une femme d’âge mûr que j’ai vue en consultation il y a une quinzaine d’années. Elle souffrait de vertiges paroxystiques. Les examens neurologiques, les EEG, les scanners, les médicaments : tout cela ne donnait rien.
Au bout de 6 séances, je lui expliquai que c’était un refus d’éveil énergétique. Cela m’apparut sur la base de mon expérience de médecin et également en tant que psychiatre. Je pouvais faire le lien entre ses vertiges sans cause neurologique, et le type de personnalité de Romi. Je lui proposai le divan pour une psycho-somato-analyse et posai ma main sur son plexus solaire. Ce contact physique eut lieu pendant une heure. Il permit à la dimension corporelle d’être intégrée dans la thérapie, tandis que la recherche des causes passa par le verbal. Une nouvelle séance lui fit ressentir une quasi-brûlure au niveau du dos. C’était un réveil de l’énergie avec un blocage au niveau des cervicales. Lors d’une autre séance, elle eut des éclairs dans les yeux pendant une heure. C’était le blocage de l’anneau cervico-scapulaire qui s’exprimait qui s’était levé et permettait maintenant à l’énergie de monter jusqu’au sixième chakra dans la tête. Mais ce dernier chakra était encore fermé. Cette énergie trop forte se déchargeait par ces éclairs oculaires. Les séances de psycho-somato-analyse assouplirent ces blocages et firent disparaître les vertiges.
Comment comprendre la prolifération des méthodes ?
La plupart des psychothérapeutes de nos jours se sont formés à 2, 3 ou 4 méthodes, mais ils les juxtaposent. Ils font de la thérapie verbale, puis de la relaxation, puis ils reçoivent éventuellement des couples. C’est une bonne chose, mais ça a des limites.
La deuxième étape, ce sont les thérapeutes qui synthétisent 2, 3 ou 4 méthodes, pour en faire une nouvelle. Le désavantage, c’est que ça crée un foisonnement de thérapies souvent très similaires. Il y en aurait entre 400 et 700 selon les sources. Le grand public ne s’y retrouve plus.
Un troisième courant, dénommé « éclectique et intégratif », a essayé de définir les processus de base communs de la psychothérapie et du psychocorporel. A partir de là , ce courant a réuni les méthodes. Mais dans la pratique, le même phénomène se reproduit : chacun prend une dizaine de méthodes, les mélange et en fait une synthèse.
La prolifération continue.
Personnellement, je propose une méthodologie qui intègre plusieurs méthodes sans les fusionner. On ne crée rien de nouveau, on utilise la méthode la plus appropriée. C’est ce que j’appelle la pleine intégration, qui intègre psychothérapies verbales, thérapies psychocorporelles et thérapies de groupe.
Que peuvent nous amener ces méthodes psychocorporelles ?
Dans la psychothérapie verbale, le seul outil est la parole, une pratique douce, qui ne vous emmène pas nécessairement dans des expériences profondes.
En psychanalyse, il arrive qu’on travaille sur des problèmes durant des années sans les atteindre vraiment.
Quand on passe en somatothérapie, tout d’un coup, ça fait bouger les profondeurs. Les gens sont souvent très étonnés. Ils disent : « Je croyais avoir réglé tout cela. »
Si je n’ai pas de sensation, de sensibilité, de sensitivité, de sensualité, je peux passer des années sur un divan de psychanalyste sans que ça les débloque. Alors qu’un travail corporel les réveillera en peu de temps. Il y a des choses importantes qui ne se passent qu’au niveau du corps. Si je suis tendu dans mon corps, parler pendant 10 séances ne suffira pas à le détendre. Mais la relaxation, le massage et d’autres méthodes vont y parvenir, et en retour, cette détente va influer sur ma psychologie. Sur des sujets complexes, la réponse doit être globale, faire appel au ressenti, à l’émotionnel, à l’affectif, à des éveils énergétiques et à des changements d’état de conscience.